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Vendredi (21/10/05)
Podcast contre journal télé
Depuis que je manipule les podcasts avec dextérité, j’en ai plein les oreilles. Des émissions de radios en son numérique se téléchargent tous les jours dans mon lecteur Mp3. Je n’ai qu’à piocher sur mon écran d’ordinateur pour choisir celles qui conviennent à mon humeur.
Un jour c’est Larqué Foot ou Luis Attaque grâce à RMC, une autre fois In Vino, une émission sur le vin avec BFM, ou encore mieux, On refait le monde animée par Pascale Clark diffusée tous les jours sur RTL. Tous les matins, tandis que j’attends l’arrivée de mon train sur un quai de gare, j’écoute les commentaires sérieux des hommes et femmes de médias qui viennent en direct s’exprimer. Comme ils se connaissent tous, il y a rarement des haussements de ton dans la voix, mais comme le panel est éclectique, des idées peuvent s’échanger et la langue de bois est au placard. C’est tout le contraire du journal télévisé de vingt heures. C’est fini, je l’ai définitivement mis au ban de ma curiosité. Je ne supporte plus ces présentateurs sans opinion qui jouent les disc-jockeys de l’information. Ils nous présentent à la chaîne des reportages sur l’actualité du moment sans aucune profondeur. On y voit des images lesquelles, selon l’ordre de leur montage, expriment au bout du compte la volonté du rédacteur en chef le téléphone à la main avec le patron de la chaîne qui l’embauche. Il a tellement peur de se faire virer qu’il interdit toute audace intellectuelle susceptible d’heurter la courbe de l’audience. Elle ramollit tous les jours, mais cela ne l’inquiète pas davantage tant qu’il conserve sa place privilégiée. La palme de la non-information va pour les directs, souvent sur des lieux de catastrophe, où l’on voit un pauvre journaliste tremblotant face à une caméra, avec en arrière plan les ruines de l’actualité pour laquelle on l’a envoyé sur place. Après quelques mots prononcés avec éclat dans le micro qu’il tient à la main, on s’aperçoit très vite qu’il n’a, en vérité, absolument rien de nouveau, que l'on ne sache déjà, à nous dire. Il se contente de répéter ce que le quidam est capable de lire dans les news de Yahoo en temps réel. Il donne l’impression qu’on l’a prié de faire le voyage uniquement pour mettre en avant la réactivité de la rédaction face aux événements. Il est là, avec ses congénères, dans le même embarras, le même ennui, que le téléspectateur partage avec lui. La voix de Pascale Clark est donc devenue ma parole d’Evangile. Elle est maligne cette Pascale Clark. Derrière sa douce voix intelligente nous devinons une femme assise dans son époque, mais plus dans la peau d’un témoin impartial que dans celle d’une militante passionnée. Aux premières notes de son timbre, je sais que je vais apprendre en quelques minutes plus de choses que si j’étais resté bouche bée devant mon téléviseur plasma. Pendant que mes oreilles enregistrent, mon cerveau se met en friction. Je trépide comme un citoyen qui se donne l’impression d’avoir accès à quelques bribes de vérité. Aujourd’hui, voici un extrait du livre de Lionel Jospin qu’il s’apprête à faire imprimer par le biais des rotatives de l’île de Ré. Il est lu en direct et commenté avec compassion. Une alliance implicite entre des grands dirigeants d’entreprise, des financiers, des cadres élevés d’industrie et des services, certains hauts fonctionnaires de l’Etat, et des privilégiés des médias forment la nouvelle aristocratie.Ce n'est pas demain que l'on verra un Jean-Pierre Pernaud lire face à une caméra un tel extrait. Il préfère cligner de l'oeil en lançant un sujet sur la rénovation d'un clocher au fin fond du Berry, plutôt qu'interpeller dans les chaumières. C'est un employé corvéable à la solde de la nouvelle aristocratie contre laquelle s'élève le battu du 21 avril. Ecrit par Raskolnikov, a 19:49 dans la rubrique "Actualités".
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Mercredi (12/10/05)
Extraits lucides à la télévision
Le zapping de Canal+ peut parfois en dire plus sur l’actualité que tente minutes officielles orchestrée par une présentateur-tronc, sous le couvert d’une rédaction.
Hier soir, en quelques instants, le plus obtus téléspectateur pouvait avoir un éclair de lucidité. Des extraits de l’émission mettant en scène la grande générosité de la première dame de France succédaient à une scène de la vie ordinaire à l’heure de la grande pauvreté. «Si je ne me frotte pas les yeux avec obstination, je me laisse persuadé qu’il s’agit d’un résumé d’une émission de la télévision de Corée du Nord. Une chaîne soviétique à l’heure du libéralisme. Le public braille aux éclats pendant l’entrée en scène de la sommité élyséenne. La journaliste présentatrice aux ordres salue sans vraiment la questionner son invité en ne comptant pas les éloges. Les artistes prestigieux ,aux anges, se tiennent prêts à tirer la chansonnette édulcorée de tout propos critique. Jamais la propagande du pouvoir n’est à ce point aussi virulente que dans la diffusion de ces images. Mêmes les cameramen sont au garde-à-vous pour ne pas se faire remarquer.» Les vieux peuvent mourir sereinement dans leur chambre d’hôpital. Bernadette prie pour leur salut. « Et nous voilà devant un pavillon de banlieue ordinaire devant une meute de journalistes. Un camion se gare avec un huissier comme chauffeur. Des gorilles sont chargés d’expulser une pauvre vieille qui a eu le malheur de se porter caution pour une transaction de son fils. Elle doit quitter sa maison au nom de la loi. Elle pleure en se cachant le visage puis tend une feuille avec des inscriptions quasi illisibles. Son sort nous glace. » « Mais sainte Bernadette revient au premier plan avec un petit sourire aux lèvres. Elle parle de Lacroix le couturier, pas celle qu'elle ne portera jamais sur ses épaules . Tout le monde reste muet devant tant d’éloquence. Cette dame mérite une statue dans le saint Sépulcre. C’est la Vierge Marie du PAF. Notre président doit être bienheureux avec une femme de cette classe. » « Notre petite vielle vient d’être embarquée dans une ambulance. Elle n’a pu résister au choc médiatique. Son cœur vient de se briser. On doit l’emmener d’urgence à l’hôpital afin de la maintenir en vie. On la mettra ensuite dans une maison retraite jusqu’à son dernier souffle. Avec un peu chance, elle pourra profiter des pièces jaunes récoltées grâce au grand show médiatique de la dame patronnesse. » Je ne sais plus si la pauvreté se trouve dans la rue ou sur mon écran de télévision. J’ai parfois l’impression de vivre dans une époque révolue avec un pouvoir dépassé. Un retour dans le dix-neuvième siècle, à l’époque victorienne, dans un roman de Victor Hugo ou d’Emile Zola, quand les riches se donnaient bonne conscience en donnant la pièce aux malheureux. A ceci près que désormais cette charité de salon est diffusée en direct dans toutes les chaumières grâce à la télévision. Et les employés aux manettes obéissent aux vœux des puissants sans se poser de question. "Ce qu'il y a de plus grave encore que la terreur physique, c'est le fait qu'on intériorise sa servitude volontaire." Ecrit par Raskolnikov, a 15:22 dans la rubrique "Actualités".
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Mardi (04/10/05)
Sur le pavé parisien
L’autre jour, sur le pavé parisien, me dirigeant en direction de la gare Montparnasse afin de récupérer mon train, je fus troublé dans mes pensées par les coups de sifflets d’un motard gendarme ouvrant la voie pour le passage d’un cortège officiel. Des voitures luxueuses le suivaient à toute vitesse sans laisser la moindre chance au passant d’apercevoir au travers les fenêtres teintées des véhicules la ou les personnalités bénéficiant de ce privilège de la route.
J’imaginai un certain ministre de l’intérieur entouré de ses conseillers réclamant toujours plus de rapidité pour rejoindre au plus vite son bureau ministériel.
Il ne doit même plus faire attention à la tête médusée de l’anonyme qui tourne son regard dans la cohue. Un sentiment d’honneur sous couvert de la maréchaussée donne forcément un goût de puissance. Il est un seigneur moderne craint et respecté. Car à quoi peut-il courir d’autre que vers cette supériorité hiérarchique dans la foule vulgaire?
C’est l’élu de la médiocratie à l’heure de la confusion. Car l’homme politique se conduit désormais en syndic qui gère les offrandes publiques. Il fait son cinéma en travaillant son image de promesses. Il n’a peur de rien, surtout pas de monter en haut d’une estrade face à des admirateurs afin de proclamer un discours écrit par un autre. Il ne tremble pas en lâchant quelques mensonges. Son cerveau, phagocyté dans une école pour élites, ne déraillera jamais. Il maîtrise parfaitement toutes les techniques pour réagir devant l’imprévu. Il ne dort que quelques heures par nuit. Cela lui suffit pour impressionner l’homme de la rue. J’ai revu dernièrement ces images pathétiques de la dernière élection présidentielle. En pleine campagne électorale, tout à tour, le premier ministre socialiste affichant de très bons résultats économiques, puis le président de la République troublant la cohabitation qu’il avait provoquée, se retrouvent face à un cortège de syndicalistes défendant leurs emplois menacés. Le premier essuiera un camouflet devant les caméras de télévision. Il ne peut cacher son impuissance. Il n’a aucun pouvoir de riposte pour contrer le patronat quand un conseil d’administration a décidé de fermer une usine. Le second, plus roublard, emmène les syndicalistes hors champ. Il les écoute avec une moue empathique. Il leur conseille de se retourner vers le premier ministre, son adversaire, pour trouver une solution sociale. Au final, les syndicalistes se retrouveront au chômage, et le président sera réélu bruyamment. En ce jour de grève, les syndicats corporatistes bloquent les services publics au nom de la défense de l’emploi et du pouvoir d’achat. Ils se tournent vers les hommes politiques ayant les rênes du pays en main. Ils veulent leur faire peur, leur mettre la pression afin qu’ils ne viennent pas picorer dans les acquis sociaux. Je marche sur le pavé parisien en croisant un défilé CGT. Je ne sais pas pourquoi, mais, à mon corps défendant, je ressens la même distance que devant le cortège VIP. Ces hommes qui crient contre ceux qui les gouvernent ne semblent pas appartenir à mon monde. Ils sont encore dans les trente glorieuses. Ils ne respirent pas la peur au ventre du chômage. Ils attendent paisiblement une retraite précoce pour finir en beauté leurs vieux jours. Leur patron, c'est l'Etat et non pas l'actionnaire. L’homme politique ne peut plus rien pour moi dans ce monde en fuite. Je n’attends rien de lui. Je ne lui demande même pas de faire semblant de baisser les impôts. De toute façon, il n’est pas prêt de réduire les coûts de sa sécurité quand il se déplace dans sa voiture de luxe. Il sait parfaitement tirer à son profit les deniers du contribuable. Il suffit de se pencher sur les 80 millions d'euros dépensés annuellement par l'Elysée. Et le syndicaliste fonctionnaire est devenu son complice, Il maintient à niveau, aux yeux de l'opinion, son importance dans cette mauvaise comédie qu'est la mondialisation. Tant qu'il existera des paradis fiscaux, l'argent restera le seul gouvernant du monde. Ecrit par Raskolnikov, a 16:58 dans la rubrique "Actualités".
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Vendredi (30/09/05)
La volonté de Dieu rend maladroite la main de l’homme
Il y a trois ans, sombrait au large de l’océan Atlantique, l’unique navire sénégalais, le Joola, faisant la navette entre Dakar et Ziguinchor, en Casamance. Ce voyage de quinze heures pour relier les deux ports facilite le transport des marchandises et des hommes pour un coût très économique. Le passage dangereux par la route en territoire gambien enclavant la Casamance est évité. Quinze jours auparavant, en grandes pompes, les autorités sénégalaises représentées par plusieurs ministres inauguraient la remise à l’eau du ferry après une immobilisation d’une année pour diverses réparations et le remplacement du moteur. Tout le monde se félicitait de cette prouesse et espérait un essor économique rapide de toute la région.
Ce jeudi 26 septembre 2002,à Ziguinchor, 809 passagers officiellement embarquèrent à bord du Joola dont la capacité se limite à 580 places sans l’équipage. On refusa des passagers désireux de se rendre en masse dans la capitale pour la rentrée scolaire. Après la remontée du fleuve Casamance, à Carabane, on accepta d’accueillir à bord de nouveaux passagers ainsi que de grosses quantités de marchandises. Le ferry prit la mer vers 18h00 sous une pluie battante. Des témoins remarquèrent qu’il penchait anormalement d’un côté. Mais cela n’effraya personne. Au large, il retrouva normalement son équilibre. Vers 23h00, le bateau se remit à pencher, et cette fois-ci progressivement. La mer était houleuse. Les vagues et les roulis précipitèrent le basculement. En cinq minutes, il est retourné. Les quelques passagers qui réussirent à sauter dans l’eau sans heurter les parois métalliques du navire nagèrent à vue pour sauver leur peau dans la nuit, à une quarantaine de kilomètres des côtes. Un seul radeau de sauvetage réussit à s’ouvrir. Il n’y aura que 64 survivants sur les quelques deux milles personnes à bord au moment du naufrage. Les premiers secours n’arriveront que vers sept heure du matin. Ce sont des pêcheurs en pirogue peu équipés pour être efficaces. La marine sénégalaise ne surviendra sur les lieux que dix neuf heures après l’alerte. Mais il était déjà trop tard. La vitesse de réaction est requise dans un sauvetage marin. Il ne faut pas tarder une minute si l’on veut sauver des vies. Son Excellence, Mr Doudou Diop, ambassadeur du Sénégal à Paris, prend la parole lors de l’émission le Vif du sujet consacrée à la catastrophe : Je suis croyant et pratiquant. Je crois au destin. On ne peut pas balayer d’un revers de la main la volonté de Dieu. Quand on voit ce qui s’est passé aux Etats-Unis avec Katrina, la première puissance du monde. On savait que l’ouragan allait passer. Et pourtant, la Louisiane a été dévastée. Il ne se passe pas une semaine dans le monde sans son tas de morts actualisé. La passerelle au Havre. Des immeubles en feu à Paris. Des digues qui s’effondrent. La main de l’homme ne peut rien contre la volonté de Dieu. Quand le croyant et pratiquant prend la parole, l’athée pragmatique doit se taire. Qu’importe que ce dernier s’époumone à pointer du doigt les impérities humaines, le premier est persuadé de détenir la vérité. Un bateau coule pour cause de surcharge et les secours ne réagissent pas aux SOS ? C’est Dieu, dans les étoiles, qui a décidé de laisser mourir les malheureux passagers. Une passerelle soudée à la va-vite rompt sous le poids des hommes ? Le coup de puce divin aide les victimes à mourir sur le coup en se fracassant au sol. Un ouragan d’une force providentielle provoque un raz de marée lequel engloutit les pauvres qui ne conduisent pas de 4X4 pour s’échapper ? Saint Pierre ouvre les portes du paradis pour recevoir avec honneurs ses nouveaux hôtes. . Un immeuble vétuste dont l’escalier en bois est la seule issue de secours ? C’est encore le Très-haut qui attise les flammes de l’incendie. Ce qu’il y a d’incroyable chez les croyants, c’est qu’ils réclament des athées les preuves que Dieu n’existe pas. Alors que c’est à eux de nous prouver qu’une force divine dirige le monde. Pour plus de détail sur le naufrage du Joola, cliquer ici. Le site de l'association des familles des victimes...de Dieu Ecrit par Raskolnikov, a 14:00 dans la rubrique "Actualités".
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Dimanche (18/09/05)
Il vaut mieux être riche sur terre et pauvre au paradis que l'inverse
En début de semaine, tout le bataillon de personnalités, que dispose la droite française tendance UMP, est montée au créneau des médias pour nous expliquer en long et en large que la réforme des impôts sur le revenu décidée par notre premier ministre est une mesure juste et moderne. Les quatre tranches imposables vont favoriser la classe moyenne, c'est-à-dire les salariés gagnant entre 1000 et 3500 € par mois. Ils disposeront d’un pouvoir d’achat doper grâce aux économies réalisées. Ils auront tout le loisir de les dépenser en biens de consommation pour favoriser la relance de l’économie.
S’il fallait retenir une prestation, je pointerais celle de Patrick Devidjian dont le talent d’orateur est hors pair. On sent que cet avocat du barreau est redoutable dans ses convictions. Il faut avoir bien préparé le terrain pour essayer de le contrer. Ses arguments au micro de France inter étaient imparables. En buvant mon café, j’étais persuadé que mon pouvoir d’achat serait quadruplé avec l’aide de ce gouvernement. J’imagine déjà trôner dans mon salon un écran plasma de plus d’un mètre de long pour regarder les matchs de foot en quadriphonie. Quand un auditeur l’interpella en tant que contribuable de l’impôt sur la fortune, le député-maire d’Antony se lâcha avec une lucidité à faire pâlir de rage un inspecteur de police interrogeant un suspect: "L’ISF ferait fuir l’élite de notre pays vers des cieux fiscaux plus cléments. En bridant le compte en banque des riches, on freine l’essor économique de notre pays, donc on favorise le chômage." La démonstration est nette et sans bavure. Il ne manque qu’un mathématicien pour en établir l’équation. Les premiers cris d’orfraie retentirent immédiatement. Les opposants politiques se manifestèrent avec des petites phrases pour alerter l’opinion. « Les salariés, même les plus modestes, vont continuer d'être assommés par les impôts indirects pendant qu'on présente une réforme qui va principalement bénéficier aux plus hauts revenus » s’esclaffe Bernard Thibault. « Les bénéficiaires de ces mesures sont les contribuables non salariés gagnant plus de 100 000 euros par an, plus les titulaires les plus élevés de l’impôt sur la fortune. » cria vers qui veut l’entendre l’ambitieux Laurent Fabius. Moi, je veux mon écran plat dans le salon, même au prix d’un crédit revolving. Et puis, parfois, par un tour de passe-passe qui n’appartient qu’à l’actualité, un petit événement anodin vient remettre en question toute l’énergie dépensée par la dream team de notre président de la république. Ce weekend, dans le fabuleux château Yquem à Sauternes, se mariait en grande pompe la fille de l’homme le plus riche de l’hexagone, Bernard Arnault, qui vient de dépasser cette année Liliane Betttencourt, l’héritière de L’oréal, au palmarès des grosses fortunes. Parmi les quelques 600 invités trinquant pour le bonheur des jeunes mariés se bousculent des personnalités politiques labellisé pouvoir en place : Les ministres Jean-François Copé, Thierry Breton, mais aussi Nicolas Sarkozy. La reine de France, sainte Bernadette aux pièces jaunes éternelles, est également de la partie entourée de soixante gardes du corps et de sa cour habituelle afin de la tenir à l’abri des gueux curieux qui souhaiteraient voir d’un peu plus près à quoi ressemble un mariage de riches. Bernard Arnault va être un des plus grands bénéficiaires de la réforme des impôts sur le revenu. Il va pouvoir accroître sa force de frappe dans l’investissement immobilier. Après avoir acheté une propriété dans les Yvelines à quelques coudées de celle de son rival François Pinault, un hôtel particulier dans le VIIième arrondissement de 1000 mètres carrés avec piscine dont les anciens propriétaires sont les époux Lagardère, un yacht commandé à une entreprise taiwanaise pour un coût de 25 millions d’euros, et enfin un somptueux duplex à Courchevel, avec les ristournes gagnées grâce à ses amis du gouvernement, le château de Versailles lui devient accessible. Pendant que je négocierais en tremblant mon crédit revolving, je peux être rassuré sur le pouvoir d’achat de notre élite surtout quand elle s'est acoquinée avec les époux Chirac. Ecrit par Raskolnikov, a 15:20 dans la rubrique "Actualités".
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Samedi (03/09/05)
Le nouveau coup de soleil de Patrick Le Lay
--> L’art du serpent qui se mord la queue
C’est devenu une ritournelle. Chaque rentrée des classes, l’un des hommes les plus puissants de France, Patrick Le Lay se manifeste à la une de l’actualité en crachant son venin d’homme de goût. L’année dernière, ses « cerveaux disponibles » avaient fait le tour de France et de Navarre. Cette année, il revient encore plus fort avec une nouvelle mélopée.
Le patron de la chaîne de télévision française la plus culturelle du monde s’esclaffe : «La France a procédé à un génocide culturel de la langue bretonne.» Et il ajoute à l’attention des réfractaires qui contrôlent toujours leurs zygomatiques : «Je ne suis pas français, je suis breton.» J’avoue n’avoir pas ri autant depuis bien longtemps. Cet homme a vraiment un talent qui sort de l’ordinaire. J’espère que c’est lui qui a écrit les textes du futur One Man Show d’Arthur. Il faudrait lui offrir une seconde légion d’honneur, cette fois-ci aux couleurs de la Bretagne. D’ores et déjà, je peux vous annoncer que la grille de la chaîne française la plus regardée dans les maisons de retraite va subir de sérieuses modifications : La grande émission musicale présentée par Nikos Le Aliagas s’appellera désormais Danse Bretonnes Academy. Seize apprentis danseurs seront enfermés dans le château de Rosanbo près de Trégastel pour suivre des cours intensifs de suite Bigoudène ou de quadrille de Quincarneau. Le vainqueur de ce grand concours parcoura toutes les salles des fêtes bretonnes en interprétant un spectacle inoubliable. Jean-Pierre Chouchen présentera en compagnie de son ex-femme Combien ça coûte en Bretagne. Le téléspectateur apprendra à passer des vacances pour par cher dans le royaume des éleveurs de porcs. Mon incroyable fiancé breton sera la nouvelle émission de culture-réalité dans laquelle une blonde à la plastique irréprochable devra faire croire à sa famille qu’elle va épouser un breton. Tous les téléfilms américains diffusés entre les publicités seront désormais sous-titrés en bretons. Pour les malvoyants, un petit boîtier numérique a brancher sur la télé permettra le doublage quasi instantané dans la langue des Menhirs. Arthur devra être rebaptisé Pierrick s’il souhaite continuer à proposer ses émissions culturelles à la direction de la chaîne don le siège social sera d’ailleurs très prochainement délocalisé à Rennes. La grande série populaire Sous le soleil s’intitulera désormais Sous la pluie car les acteurs beaux, riches et célèbres vivront leurs passions sentimentales sur les plages de Paimpol. La résistance bretonne est en marche. Et la culture lui emboîte le pas. Heureusement que des hommes comme Patrick Le Lay survivent dans la médiocrité ambiante du pouvoir. Nous pouvons lui faire confiance sur le futur de l’intelligence. Grâce à son verbe inégalé, elle finira bien par triompher. Ecrit par Raskolnikov, a 10:59 dans la rubrique "Actualités".
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Samedi (23/07/05)
VIP, VLP et...VNP
Dans nos sociétés modernes, on ne catégorise plus les différentes classes sociales, mais seulement les individus. L’individu supérieur est le VIP ou Very Important Person, pour les inités. Il peut être à la fois le richissime François Pinault ou le commercial d’une grande surface qui négocie le prix de la boîte de cassoulet. Il suffit d’avoir un petit pouvoir économique pour entrer dignement dans la caste.
A ne pas confondre avec le Very Important People. C’est la célébrité à la mode dont les journaux étalent la vie privée à foison. Par exemple, une ancienne miss France laquelle après s’être égratignée un ongle dans sa salle de bain pendant une épilation définitive écrit un live avec un nègre pour raconter son combat contre la souffrance et squatte l’ensembles des plateaux télé à sa disposition. Au mieux, elle épousera le plus crétin des présentateurs de JT du monde. Au pire, on la retrouvera au petit matin dans une chambre d’un hôtel deux étoiles la bouche pleine de barbituriques. Les autres, c'est-à-dire la grosse majorité des citoyens peut-être scientifiquement nommés VLP, soit Very Low Person. C’est l’individu lambda qui est noyé dans la masse. Il ne s’exprime qu’épisodiquement dans les médias à condition d’être victime d’une maladie rare ou pour participer à une émission télévisée dans laquelle l’animateur le ridiculisera toutes les cinq minutes. Il rêve un jour d’atteindre ce statut de VIP, c’est pourquoi il accepte silencieusement son sort, joue le jeu de la foule en liesse pendant un évènement populaire, achète les fioritures qu’on lui demande d’acheter. La différence entre les deux statuts va apparaître de façon criarde quand un grand évènement se produit. Si notre Johnny national dépose ses tonnes de matériel à Castelnaudary pour faire son récital la distinction se met en marche. Tandis que notre commercial spécialisé en cassoulet se verra offrir une place dans le salon VIP par un de ses fournisseurs, le boucher de quartier fan depuis toujours de l’idole des jeunes paiera son billet plein pot. Le commercial dégustera tout le concert confortablement assis le verre de Champagne à la main régulièrement rempli par une hôtesse sélectionnée pour son tour de poitrine. Le boucher aura fait une queue de deux heures avant l’ouverture de la salle au public. Il passera la totalité du temps debout pris en sandwich par des midinettes aux mensurations adipeuses. Le commercial pourra saluer le grand artiste directement dans sa loge et obtenir un autographe personnalisé. Le boucher donnera du coude pour avoir le droit d’acheter gracieusement un tee-shirt à l’effigie du chanteur chiraquoïde. Il existe aussi une ultime catégorie humaine : les VNP, soit les Very Nothing People. Il s’agit de presque la moitié de la population vivant sur cette planète, avec moins d’un dollar par jour. Le VNP croupit dans son bidonville au jour le jour, parfois les armes à la main. Il observe l’occident par l’intermédiaire de sa télévision noir et blanc. Il est persuadé que là-bas tout le monde est VIP. C’est pour cela qu’il fomente l’intention d’aller migrer vers ces terres si richement mises en valeur par le petit écran. Il économise sous à sous afin de payer le passeur providentiel qui l’emmènera au pays de Cocagne. Sa désillusion sera énorme quand on le renverra manu militari d’où il vient. Non seulement il retourne à la case départ mais il aura vu que les inégalités existent aux quatre coins du monde. Ecrit par Raskolnikov, a 10:37 dans la rubrique "Actualités".
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Mardi (21/06/05)
Précariser davantage les précaires !
Notre ministre des finances vient de nous révéler que la France vit au-dessus de ses moyens. Il faudra donc que "les Français travaillent plus tout au long de leur vie." ajoute t-il avec dignité face à la meute de journalistes au pas.
Tout d'un coup, je me souviens de l'augmentation de 70% accordée à tous les ministres dès le début de l'investiture du calamiteux Raffarin. Après trois ans de gestion catastrophique du pays et un référendum raté, l'élite qui nous dirige vient de se rendre compte que le chômage atteint un niveau record. "Il faut prendre immédiatement des mesures" murmure t-on à l'Elysée. Le nouveau premier ministre décide alors de précariser encore davantage les travailleurs précaires. Car il est hors de question d'affronter les syndicats qui défendent les salariés des grosses entreprises publiques en leur demandant de lâcher du lest dans leurs avantages sociaux. C'est trop dangereux à deux ans d'une élection présidentielle dans laquelle l'avocat d'affaires, maire de Neuilly, ami des scientologues et grand défenseur de l'empire Bouygues doit triompher. Il faut s'attaquer aux plus faibles car tel est le credo des énarques qui misent sur une longue carrière à la tête de l'état. Les faibles dans cette France de début du vingt-et-unième siècle sont les actifs susceptibles d'être embauchés dans les 2,5 millions entreprises de moins de 10 salariés. Pour relancer la croissance en berne, voici donc le CNE, le contrat de nouvelle embauche. Mais pourquoi personne n’y avait penser plus tôt ? Comme le CDI est trop contraignant pour le moral des petits entrepreneurs et que le CDD fait peur au salarié précaire, il fallait trouver un contrat intermédiaire: la période d'essai de deux ans. C'est tout à fait adapté aux sociétés de services en informatique par exemple. Comme les contrats de sous-traitance sont de plus en plus courts, pas plus de 6 mois, cela va permettre de se débarrasser d'un collaborateur sans ambages dès que celui-ci connaîtra une période d'intercontrat. Une entreprise avait tout intérêt, dans l'ancien régime, à rester à moins de 10 salariés afin de payer moins de charges. Et bien, avec la nouvelle règle du jeu, en embauchant un chômeur de moins de 25 ans, celui-ci n'entrera plus dans le décompte pour le calcul des charges. Comme un smicard à partir de 2007. Comme nos hommes politiques sont incapables de trancher entre un système économique à l'anglo-saxonne et le modèle social à la danoise, ils viennent de mettre en place tout et son contraire : La précarisation absolue pour une partie des salariés du privé en favorisant une politique des bas salaires. L'allongement de la durée du travail pour obtenir le droit à la retraite, et la dévalorisation du quadragénaire sur le marché de l'emploi. Des annonces grandiloquentes pour le logement social et des avantages fiscaux énormes pour les fortunés qui veulent investir dans l'immobilier. Samedi, en plein barbecue, j'ai discuté avec une femme qui vient de se porter acquéreur d'une agence immobilière. Pour monter son affaire, elle a démissionné de son ancien emploi. Aujourd'hui, elle a toutes les peines du monde à obtenir des prêts auprès des banques afin d'avoir un investissement de départ. On lui met des bâtons des les roues parce qu'elle ne rentre pas dans la catégorie à favoriser selon les tablettes des ministères. Résultat, elle vient de renoncer à embaucher un employé. Au lieu de modifier les lois du travail à coups d’ordonnances, les têtes grises, qui font le beau à la télévision en jurant qu’ils réduiront le chômage, devraient d’abord retirer les entraves administratives qui gangrènent l’esprit d’initiative de l’homme de la rue. Ecrit par Raskolnikov, a 18:43 dans la rubrique "Actualités".
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Lundi (13/06/05)
La moue d'Arlette
Ma messe du dimanche sonne sur le coup de 12h30, en branchant mon poste de télévision, devant les gros yeux de Daniel Schneidermann. C'est l'aspirine du champ télévisuel, la démonstration qu'en s'entourant de gens de bonne volonté, un journaliste peut animer une bonne émission dans laquelle les neurones du téléspectateur s'activent.
J'en profite pour faire ma prière en jurant que la vérité est en marche sur le petit écran. Pour cette dernière émission de la saison, l'invité unique était Arlette Chabot, la directrice de l'information de France 2. Je l'aime bien Arlette, cette Arlette ( pas l'autre ), avec son faciès de femme de poigne pleine de compassion. Et elle va être la proie pendant une bonne demi-heure des attaques en règle de l'équipe d'Arrêt sur Image. Pour la première fois à la télévision, il est démontré, preuves à l'appui, que la messe du journal télévisé est devenu une sorte de bouillie qui sent bon le terroir. Par exemple, au lendemain du référendum, en décortiquant le journal de 13H00 dont Arlette est la patronne, on s'aperçoit qu'il faut attendre 35 minutes pour que l'information quitte la sphère franco-française. Entre temps, on aura été faire un tour dans la cour de l'Elysée avec Véronique la fidèle laquelle, micro à la main, mais en direct et sans trucages, raconte les allers et venus chez le président. Effectivement, il va se passer quelque chose, mais comme elle ne sait pas encore quoi, elle nous tient en haleine dans l'espoir que personne ne zappe pour aller bailler sur la chaîne d'en face. Arlette est littéralement assaillie de questions sur le néant organisé par sa rédaction à une heure de grande écoute. Et dignement, elle fait face, avec le même aplomb que le jour où elle questionna le candidat Chirac en lui demandant s'il se retirait de la course à la présidentielle. Tout le monde se souvient de la moue de petite fille dont elle se para afin de rattrapper sa bourde. Comme le corézien n'est pas rancunier, elle obtint quand même sa promotion quelques années plus tard. Elle usa de la même défense ce dimanche, en nous expliquant sans se démonter que les journalistes qu'elle avaient sous ses ordres faisaient le plus correctement possible leur travail. Il fallait être sur le perron de l'Elysée ce jour-là, car rien que d'y être, c'était déjà de l'information. Quand Daniel Schneidermann l'interrogea sur l'annulation de dernère minute de l'émission Cent minutes pour convaincre avec comme invité José Manuel Barroso, elle répondit avec son regard de cocker battu que c'était à son initiative que le président de la Commission européenne avait été renvoyé à Bruxelles. Elle n'avait pas attendu les foudres de l'Elysée pour prendre une telle décision qui fera date dans les écoles de journalisme. L'estocade fut portée avec l'extrait de l'émission qu'elle anima à deux jours du réfrendum dans laquelle le pauvre Cohn-bendit supplie notre Arlette de démentir les mensonges en série vociférés par le Vicomte de Villiers. On l'entendit murmurer un agonisant propos d'impuissance en guise de réponse. Son calvaire pris fin quand elle reconnut avec une grande dignité que le résultat du référendum était une occasion pour la presse de télévision de se remettre en question. Il faudrait peut-être élargir le champ de l'information pour donner le goût de l'Europe au téléspectateur moyen. Je versai une larme bénite pour saluer sa dernière moue. Ecrit par Raskolnikov, a 17:49 dans la rubrique "Actualités".
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Mercredi (01/06/05)
Sex Traffic, en Europe
Les débats sur le référendum se poursuivent partout sur nos ondes. Le dernier en date que j’ai écouté d’une oreille fine se déroulait autour de l’économiste Emmanuel Todd dont on doit des ouvrages critiques sur la mondialisation en cours. Il a voté Oui dimanche, encore un Oui de raison, car il est persuadé que le projet d’une Europe capable de s’organiser vaut mieux que le laisser-faire dans lequel nous sommes tombés pour un temps indéterminé.
Il met en avant cette France contestataire dont l’origine remonte à 1789 contre les élites qui la gouvernent. Il s’étale sur cette classe moyenne inférieure qui s’oppose désormais à la classe moyenne supérieure. Tandis que les hauts revenus investissent dans l’immobilier et s’assurent de confortables plus-values, les revenus moyens stagnent, s’endettent sur trente ans, périclitent. On a l’impression qu’au rythme où vont les choses, on distinguera deux sortes de catégories sociales sous la domination du néolibéralisme, le seul vainqueur du référendum de dimanche, le surhomme appelé communément par les médias VIP, et le sous-homme, le citoyen lamda qui doit toujours payer sa place partout où il se déplace, en situation de précarisation permanente, caricaturé dans les émissions de télévision à audience populaire. Et puis, un téléfilm anglais vient de me rappeler l’essentiel. Si je suis un sous-homme quand un gorille me demande sans élégance de ne pas entrer dans la loge VIP d’une manifestation culturelle, je deviens un surhomme quand je m’approche en voiture d’une prostituée roumaine faisant les cent pas sur le bitume. Sex Traffic est une production indépendante financée par la chaîne de télévision britannique Channel 4. L’histoire décrite est celle de deux sœurs moldaves, Elena et Vara, tombées dans un réseau d’esclaves sexuels. Ce téléfilm est en train de faire le tour des festivals, tant le sujet fort, secoue les consciences. Il a même été projeté au Parlement européen. En assistant impuissant devant mon écran de télévision à cette véritable descente aux enfers, je me demandais ce que je pouvais faire dans mon quotidien contre cette atteinte à la dignité humaine. Comment faire en sorte que l’extrême pauvreté de certains pays de l’Est se réduisent de façon à empêcher que des mafias se constituent pour vendre de la chair humaine aux plus offrants ? Le producteur de ce téléfilm, Derek Wax, se laisse aller à des commentaires qui résument parfaitement les mœurs actuelles véhiculées par les médias : « Quand on a entendu la voix de ces filles, on se dit que ce n’est pas possible qu’on ne les entende pas davantage. On vit dans un monde où l’on donne continuellement la parole à des crétins, à des célébrités sans souci. La télé les invite en boucle dans ses talk-shows. Où entend-on ceux qui souffrent ? » Ecrit par Raskolnikov, a 16:22 dans la rubrique "Actualités".
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