Nous saurons si une nouvelle étape sera franchie dans l’histoire de cette vénérable institution. Nous saurons si les derniers soubresauts du président seront suffisants pour retourner la situation désespérée.

Hier soir, il a encore changé ses habitudes en prenant la parole tout juste avant le dîner. Tel un de Gaulle du vingt et unième siècle, il n’a pas hésité à accentuer le catastrophisme dans le cas où les pronostics se confirmeraient. Cela serait un véritable tremblement de terre dont tant de monde auraient à souffrir. Il faudrait tout recommencer, sur de nouvelles bases, avec un nouveau projet. Il commencerait d’abord par changer l’équipe en place. Tous les protagonistes de la défaite seraient écartés. A commencer par celui qui mène la barque.
Le président ne démissionnera pas. Il en est hors de question. S’il y a un journaliste qui ose faire cette hypothèse, il sera banni des conférences de presse jusqu’à la fin de son mandat.

Quel gâchis ! Qui aurait pu imaginer il y a quelques semaines que nous en serions là aujourd’hui.
Les spécialistes prennent la parole tour à tour dans les grands médias. Ils donnent des explications qui tiennent la route. A vouloir miser en premier lieu sur l’économie, on en vient à négliger ce qui fait vibrer les foules. Trop de gestion et pas assez de construction. Les cadres vendus au plus offrant, les bonnes décisions ont tardé pour combler les déficits. La frontière vers l’Est fut grande ouverte, mais il y eut des erreurs dans les transferts. Et puis, cela ne devait être qu’une formalité.

Jojo n’achète plus de journal depuis une semaine. Il est fatigué de tous les commentaires déferlant dans la presse. Il se bouche les oreilles pour diminuer les angoisses. Il ne sait toujours pas ce qu’il fera le jour J. Retrouvera t-il les copains comme d’habitude, ou bien, restera t-il cloisonné dans son deux pièces en écoutant les résultats à la radio ?

Je le retrouve au café des Sports avec son double calvados au fond de son expresso. Cette après-midi, c’est RTT. Il peut faire ce qu’il veut pour passer le temps. Il lorgne un instant en direction du téléviseur dont le fond orange sur point jaune diffuse le combat d’un jeune français à Roland Garros. En aparté, un plan fixe sur une personnalité à chapeau qui digère un steak-frites dans une loge VIP. Quoiqu’il arrive, on retrouvera cette même personnalité la semaine prochaine se promenant dans les allées de la porte d’Auteuil, le sourire aux lèvres.

Jojo promet d’arrêter le double calva si le miracle se produit. Il me montre l’écharpe qu’il conserve toujours sur lui, malgré la chaleur. Car Jojo est un supporter du FC Nantes depuis sa tendre enfance. Il ne veut pas voir descendre ses Canaries en Ligue 2 au coup de sifflet final samedi soir.