Nous sommes à nouveau conviés dans la salle de réunion autour de Miss particulièrement avenante.
Elle a forcément une bonne nouvelle à nous confier. Nous nous en réjouissons à l'avance.
Tout le monde est présent, ou presque. Il manque Blaise. A cette heure-ci, il caresse dans le sens du poil le joli pubis d'une charmante Thaïe dans les environs de Pattaya. Le veinard!
Je me contente de poser mes mains moites bien à plat sur la table circulaire autour de laquelle nous sommes tous nonchalants.

"A partir d'aujourd'hui, vous n'êtes plus en intercontrat. Vous pouvez vous considérer à plein temps sur le projet GPED !" s'écrie Miss avec un sourire aussi large que l'échancrure de Pamela Anderson.

Nous fîmes tous un bon sur notre chaise. Une hola démarra accidentellement.

"On se calme ! Comment allez-vous réagir cette fois-ci à l'annonce d'un nouveau projet que l'on vient tout juste de gagner. Après GPED, nous enchaînerons sur le projet FJM, avec des déplacements dans toute la France, et si tout se passe bien, à l'étranger."

Un silence de mort s'abattit dans l'atmosphère. La plupart d'entre nous espéraient enchaîner sur six mois d'intercontrat après le projet GPED qui doit s'achever fin septembre. C'était aussi la confirmation que nos têtes ne tomberont pas tout de suite du billot en cas de plan social.

Miss nous révèle son stratagème pour mener à bien la mission qu'elle coordonne. Elle a établi des équipes de trois ou quatre techs avec un team leader comme superviseur. Ce dernier fera reposer sur ses frêles épaules l'entière responsabilité des travaux. Il n'est pas prévu pour l'instant qu'une prime vienne récompenser ses bons loyaux services hiérarchiques.
J'apprends vite que je me contenterai d'un rôle de "team loser".

Mon chef sera Bruno. Ca tombe bien, car c'est plutôt un ami. C'est un petit bonhomme toujours en mouvement qui n'a pas sa langue dans sa poche. J'ai déjà eu l'occasion de faire de la route en sa compagnie. Quand il n'a pas son téléphone portable coincé contre une oreille, il allume une gauloise dont la fumée a pris l'habitude de se faire absorber par les poumons de ses voisins. Ma femme remarque tout de suite que j'ai croisé Bruno dans la journée quand je pue le tabac en l'embrassant.

Thierry et Mohamed nous accompagneront pour une première intervention sur Belfort et Mulhouse prévue dans 15 jours. Avant cela, dans l'open space, nous devons nous mettre dans une ambiance professionnelle en étudiant les plans de câblage des deux magasins où nous interviendrons.

Notre tâche informatique sera de remplacer les terminaux des vendeurs par des mini PC fraîchement sortis d'usine. Il faudra se pencher sur le brassage réseau pour arriver à ses fins. Je simplifie de raison afin de ne pas décourager les néophytes aux joies de l'informaticien de base des années 2000. Il est en quelque sorte un artisan sans bleu de travail mais avec la passion dans l'âme pour ne pas céder aux sirènes du découragement.

Demain, sur ce même Joueb, je promets de faire une petite synthèse du matériel que nous aurons à déplacer avec nos petits bras ballants.

Miss nous donne le signal pour aller déjeuner. Elle semble avoir confiance en notre potentiel. Elle affiche nettement une fierté sur son visage méditerranéen, celle du commandant qui a bien en main son bataillon de soldats.