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Licencier pour sous-traiter
Nous quittions Metz avec l'honnêteté d'avoir accompli du bon travail. Quatre jours d'acharnement dans la salle informatique pour mettre à jour le réseau de ce grand magasin à vocation culturelle. Nous étions fiers dans les rayons pour une ultime vérification, entre le stand réservé à la promotion du DVD du journal de Bridget Jones 2, et le panneau vide tout à la gloire du dernier tome d'Harry Potter dont le texte original en anglais s'est vendu aussi vite que les confessions de Brigitte Bardot après la castration de son âne.

Quand tout à coup, en sirotant un expresso sur une aire d'autoroute aux environs de Reims le téléphone du team leader sonna.
C'était Catherine, le chef de projet maison qui a tendance à prendre les sous-traitants pour des moins que rien.

-"Revenez immédiatement sur site car trois postes ne fonctionnent plus."

L'informatique devient un métier ingrat. Non seulement c'est de plus en plus mal payé, mais en plus, le donneur d'ordres qui est la plupart du temps un client exige des compétences multiformes à son service capables d'oeuvrer sans limite d'horaire presque bénévolement.

HP, par exemple, ce grand constructeur informatique dont l'aventure a démarré dans un garage en 1939 vient d'annoncer le prochain licenciement de 10% de son personnel à travers le monde. C'est la deuxième vague en deux ans depuis la fusion avec Compaq. Elle ne sera certainement pas la dernière. Cette grande entreprise née grâce au génie de deux ingénieurs appartient aujourd'hui à des financiers dont les perspectives ressemblent aux camemberts de leurs tableaux excel.
J'ai pu observer leurs manoeuvres de l'intérieur en travaillant en tant qu'externe dans la division des services pendant deux ans. Le but est de vendre à leurs clients leurs prestations les plus chères possible en faisant travailler le sous-traitant qui répondra à l’appel d’offres avec le coût le plus bas. La marge entre le prix du prestataire et la facture du client final a de plus en plus tendance à se creuser. D’ici quelques années, le géant américain atteindra sa taille idéale, c'est-à-dire un exécutif réduit à sa juste mesure, commandant un bataillon de sous-traitants dans le monde entier en faisant jouer la concurrence pour accroître sans cesse ses profits. Le maillon en fin de chaîne, c'est-à-dire l’ingénieur indien qui travaille comme un fou dix heures par jour pour mettre en point une nouvelle technologie, ou le technicien roumain qui installe le matériel, seront pressés comme des citrons afin d’obtenir un jus le plus corsé possible.

En roulant à demi-vitesse sur l’autoroute A31 en direction de Paris, je sentis mon collègue au volant de la Yaris de service en pleins doutes. Il allumait cigarette sur cigarette sans me demander si la fumée me dérangeait. C’était lui qui avait effectué les dernières opérations aux ordres du client guidant l’opération en toute tranquillité en direct de Paris. Un routeur avait été déplacé à la dernière minute pour simplifier le plan de câblage. Et si c’était lui l’origine de cette panne tombée derrière notre dos. A la signature de la recette, tout juste avant de prendre la route, tout était parfaitement en état de marche.

A proximité de Champigny-sur-Marne, le téléphone se remit à sonner. C’était encore la Catherine, le chef de projet, mais aussi le client, notre donneur d’ordres, le potentat.

-"Vous retournez tout de suite sur Metz ! C'est un ordre !"

Mon collègue me déposa devant chez moi sans se débarrasser de son anxiété. Je lui proposai de boire une petite mousse à la maison afin de lui changer les idées. Il dédaigna poliment l’invitation. Quand mon sac sur l’épaule, je cherchai mon jeu de clefs pour franchir le portail, je l’observai dans sa voiture le visage décomposé. Il mit cinq bonnes minutes avant de repartir.
Ecrit par Raskolnikov, le Vendredi 22 Juillet 2005, 09:31 dans la rubrique "Vie professionnelle".