Réflexions momentanées - Lire la Constitution européenne, pour le plaisir

Comme mon employeur me gratifie de pas mal d’heures de liberté en ce début d’année, pour combler les trous de mon emploi du temps, j’ai décidé de lire le traité de la Constitution européenne pour lequel nous irons bientôt aux urnes. Vais-je me prononcer pour un Oui, ou pour un Non, sans connaître le sujet sur lequel on m’interroge ? Dois-je établir mon opinion en regardant PPDA tous les soirs un mois avant le référendum ? Abandonnerai-je à mes hommes politiques préférés ma décision sans une réflexion approfondie ? Que nenni ! Me voilà pianotant sur Google pour débusquer le lien magique où je vais combler mon souffle d’indépendance intellectuelle.

Au bout d’un petit quart d’heure d’une lecture attentive, mon cerveau se mit à grésiller tel un néon qui va bientôt s’éteindre. Je clignai de l’œil en direction du dernier Télé7jours trônant sur la table basse Ikea en face de la télévision. Je me demandai pourquoi la politique ne ressemble pas à un jeu animé par Jean-Pierre Foucault… Je me suis très vite rabattu sur un résumé établi par un plus intelligent que moi. Et voici ce que j’ai appris :

Savez-vous que le texte de la Constitution européenne est 14,7 fois plus long que celui établi pour la constitution française ? Des mots à faire froid dans le dos sont très souvent répétés, comme « banque » 176 fois, « marché » 88 fois, « libéralisation » 9 fois, « marchandises » 11 fois, « terrorisme » 10 fois, ou « religieux » 13 fois. Bernard Cassen, du Monde Diplomatique s’interroge : « S’agit-il bien d’une Constitution européenne ou d’un copié-collé des statuts du Fonds monétaire international et de la charte de l’Organisation mondiale du commerce, agrémenté d’un coup de chapeau à George W.Bush pour le terrorisme et au Vatican pour la religion ? »

A ce stade de ma recherche d’information, mon corps était déjà en sueur. J’étais dans la peau d’un adolescent qui vient de regarder en cachette Massacre à la tronçonneuse !

Sur les 10 pays qui ont décidé de passer par le référendum pour ratifier ce traité, il paraît que c’est le cas de la France qui inquiètent le plus les observateurs. Le débat y est plus animé. La preuve, hier, la CGT, contre l’avis de son secrétaire général, a choisi le camp du Non. Il n’y a pas que ma pauvre carcasse qui frémit devant ce texte déjà plébiscité par le Medef. J’espère que Zinédine Zidane, qui participe à une campagne publicitaire en Espagne pour le Oui, fréquentera les plateaux de télévision en France pour témoigner. S’il est aujourd’hui un multimillionnaire, n’est-ce pas grâce « à la libre circulation des personnes, des services, des marchandises et des capitaux" dont le football fut le précurseur?

Après avoir définitivement effacé le texte de la Constitution que j’avais téléchargé sur mon ordinateur, j’étais persuadé que, comme dans une bonne série B hollywoodienne, l’issue se terminerait par la victoire du bon camp. S’il faut en passer par trente référendums, nous en passeront par trente référendums. Le Oui ne va pas se laisser intimider. La positive attitude est plus forte que la sinistrose. La mondialisation libérale ne peut échouer en Europe.