J’ai toujours rêvé d’aller faire un tour dans un cerveau féminin.

Imaginons que je trouve par hasard, dans ma SSII, derrière un meuble poussiéreux, une ouverture pour entrer dans un passage souterrain. Je me laisse tenter pour y pénétrer et je glisse dans un tunnel humide… Je me réveille dans la conscience de ma femme. Je savoure chacune de ses pensées. Je comprends pourquoi elle insiste pour que je bascule la lunette des toilettes après que je l’aie remontée. Je me mets à sa place quand elle rudoie son pauvre mari parce qu’il ne fait preuve d’aucune initiative pour passer l’aspirateur ou un coup d’éponge dans l’évier de la salle de bain. Je ressens toute la frustration de l’épouse éconduite pendant un match de foot à la télé. J’épie ses arrière-pensées quand un bellâtre témoigne à cœur ouvert dans une émission de Delarue.

Les plus cinéphiles auront reconnu le début du scénario de l’inoubliable film de Spike Jonze Dans la peau de John Malkovich.

Ce n’est donc que du cinéma. J’ai beau remué discrètement chaque meuble de l’open space, je ne vois aucune trace d’un orifice qui me permettrait d’espérer une telle aventure.

A moins que ma femme se mette à son tour à faire un blog, et que je puisse consulter ses états d’âme chaque jour sans qu’elle ne se doute de quelque chose.

Pour ma part, afin de ne pas inverser la situation, j’ai déjà pris mes précautions. Je lui ai donnée l’adresse internet de mon site. Ainsi, quand je commence à écrire, j’ai automatiquement le réflexe de la mettre en valeur. Quand elle prend le temps de me lire, elle remarque immédiatement à quel point je l’aime, et verse une larme tendre à mon attention.

Il y a quelques semaines, je me suis égaré sur le journal d’Olivia. Et j’avoue avoir beaucoup de plaisir à découvrir chaque semaine ses révélations sentimentales. Car Olivia, en jeune femme bien établie dans son époque, ne nous épargne rien de sa vie amoureuse et de ses petits tracas féminins. Elle décrit à la fois les hésitations de son nouveau copain et la crème amaigrissante qu’elle utilise pour maintenir la séduction de sa silhouette. Elle se confesse avec une rare sincérité. C’est un véritable plongeon dans un cerveau féminin pour l’homme que je suis. Si j’étais chimiste, je serai capable de trouver l’équation neuronale capable d’enclencher le processus amoureux chez une femme. Ce qui est le plus incroyable dans ses articles, c’est le néant du monde extérieur. Si demain, une bombe nucléaire était tirée en direction de notre beau pays, elle en serait encore à se demander si elle recouche avec son ex cinq minutes avant l’impact final.

Pour vous, Madame ou mademoiselle, qui souhaiterez faire le plongeon inverse, c'est-à-dire se mettre dans les sensations d’un homme moderne, je vous invite à découvrir le déjà célèbre blog de Frantico. C’est un jeune illustrateur qui a eu la bonne idée de se raconter en bandes dessinées. C’est absolument savoureux. Je peux vous certifier que tous les hommes peuvent se reconnaître dans l’un des épisodes de l’antihéro dont on découvre au quotidien les déboires amoureux. Même Daniel Schneidermann, en personne, avoue avoir tout lu d’une traite.
Le site enregistre environ 8000 connexions en moyenne par jour. Cela fait rêver l’ambitueux blogueur que je suis. Pour récompenser son succès, un éditeur vient de l’engager. Et depuis, l’idole du net se fait plus discret.

Et si la clef du phénomène blog, c’était cela : Les hommes et les femmes ont désormais la possibilité de mieux se connaître en révélant les dessous de leur cerveau ?